Page:Michel - La Commune, 1898.djvu/416

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surtout à détruire tout ce qui pouvait compromettre qui que ce soit.

» Après avoir été mise trois fois en joue pour être fusillée, on m’envoya à Satory où j’arrivai une des premières, et pendant quatre jours je couchai dans la cour sur des cailloux.

» Je passai à la commission mixte avec ma mère, qui avait été arrêtée pour moi, ce qui mettait en double ma personnalité.

» On nous fit monter dans une sorte de grenier près du magasin à fourrages ; il était nuit, il pleuvait comme un déluge.

» Alors Louise arriva avec les vêtements gouttants comme un parapluie, étant aussi prisonnière. Je les tordis sur son dos et comme j’avais une paire de bas dans ma poche, je les lui donnai en place des siens que nous avions bien de la peine à retirer, tandis qu’elle nous racontait qu’on devait la fusiller le lendemain matin.

» On parlait de cela comme on aurait parlé de n’importe quoi, on était heureuses de se revoir surtout.

» On avait dit de ne pas fouiller Louise en entrant parce qu’on allait la fusiller ; c’était sans doute à cela que je devais aussi de ne pas l’avoir été. J’avais pas mal de papiers ; elle en avait quelques-uns aussi, entre autres un ordre de faire délivrer un des petits orgues de Notre-Dame et le faire transporter pour les leçons du chant de l’école.

» Nous étions sept : ma mère, M. et madame Millière, madame Dereure, moi, Louise et la sous-maîtresse de son école, Malvina Poulain. Une femme vint me demander mes papiers de la part des officiers, mais je répondis que je n’en avais pas et en silence, à nous sept, nous commençâmes à les mâcher, ce qui n’était pas une petite entreprise.