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L’ESCOLE DES FILLES.

Susanne. On n’a garde, m’amie, de le sçavoir, puisqu’elles le font en cachette, et on ne le sçait non plus d’elles que l’on le sçaura de toy, ou de moy aussi. Vrayement, il y a plus de la moitié qui le font, et si par hazard les parents viennent à le sçavoir de quelqu’une, ils n’en disent mot à personne, et ne laissent pas cependant de la marier à quelqu’un qui n’en sçait rien.

Fanchon. Et Dieu qui sçait tout ?

(32) Susanne. Dieu qui sçait tout ne le viendra pas dire et ne descouvre rien aux autres. Et puis, à bien dire, ce n’est qu’une petite peccatille que la jalousie des hommes a introduite au monde, à cause qu’ils veulent des femmes qui ne soyent qu’à eux seuls ; et croy-moy d’une chose, que si les femmes gouvernoyent aussi bien les églises comme font les hommes, elles auroient bien ordonné tout au rebours.

(33) Fanchon. Les hommes pourtant, à ce qu’il me souvient avoir entendu dire à ma mère, ne laissent pas de dire qu’ils font mal comme nous, et s’ils avoient estably cette loy, comme vous dites, ils ne l’auroient point establie contre eux-mesmes.

Susanne. C’est pour abuser d’autant plus qu’ils en ont fait. Car s’ils ne s’estoient pas soubmis à ceste loy qu’ils ont inventée, les femmes auroient dit : Ho ! ho ! et pour quoy

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