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PRÉFACE DE 1869.

philosophie et de l’histoire. Mon Précis, mon Vico, publiés en 1827, lui paraissaient des titres suffisants. Ce double enseignement que j’eus encore plus tard au Collège de France, m’ouvrait un infini de liberté. Mon domaine sans bornes comprenait tout fait, toute idée.

Je n’eus de maître que Vico. Son principe de la force vive, de l’humanité qui se crée, fit et mon livre et mon enseignement.

Je restai à bonne distance des doctrinaires, majestueux, stériles, et du grand torrent romantique de « l’art pour l’art. » J’étais mon monde en moi. En moi j’avais ma vie, mes renouvellements et ma fécondité ; mais mes dangers aussi. Quels ? mon cœur, ma jeunesse, ma méthode elle-même, et la condition nouvelle imposée à l’histoire : non plus de raconter seulement ou juger, mais d’évoquer, refaire, ressusciter les âges. Avoir assez de flamme pour réchauffer des cendres refroidies si longtemps, c’était le premier point, non sans péril. Mais le second, plus périlleux peut-être, c’était d’être en commerce intime avec ces morts ressuscités, qui sait ? d’être enfin un des leurs ?

Mes premières pages après Juillet, écrites sur les pavés brûlants, étaient un regard sur le monde, l’Histoire universelle, comme combat de la liberté, sa