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HISTOIRE DE FRANCE.

victoire incessante sur le monde fatal, bref comme un Juillet éternel.

Ce petit livre, d’un incroyable élan, d’un vol rapide, procédait à la fois (comme j’ai fait toujours) par deux ailes, Nature et Esprit, deux interprétations du grand mouvement général. Ma méthode y était déjà. J’y disais en 1830 ce que j’ai dit (dans la Sorcière) de Satan, nom bizarre de la liberté jeune encore, militante d’abord, négative, mais créatrice plus tard, de plus en plus féconde.

Jouffroy venait d’articuler en 1829 le mot essentiel de la Restauration : « Comme les dogmes finissent. » En Juillet, l’église se trouva désertée. Aucun libre penseur n’aurait douté alors que la prophétie de Montesquieu sur la mort du catholicisme, ne dût bientôt être accomplie.

J’étais sous ce rapport l’homme peut-être le plus libre du monde, ayant eu le rare avantage de ne pas subir la funeste éducation qui surprend les âmes avant l’âge, et d’abord les chloroformise. L’église était pour moi un monde étranger, de curiosité pure, comme eût été la lune. Ce que je savais le mieux de cet astre pâli, c’est que ses jours étaient comptés, qu’il avait peu à vivre. Mais qui succéderait ? C’était la question. Elle était embrouillée du choléra moral qui suivit de