Page:Michelet - La Mer, 1875.djvu/256

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le souffleur essoufflé (c’est le vrai nom du genre), semble dire : « Ô nature ! pourquoi m’avoir fait serf ? »



Sa vie fut un problème, et il ne semblait pas que l’ébauche splendide, mais manquée, pût durer. L’amour furtif, si difficile, l’allaitement au roulis des tempêtes entre l’asphyxie et le naufrage, les deux grands actes de la vie presque impossibles, se faisant par effort et par volonté héroïques ! — Quelles conditions d’existence !

La mère n’a jamais qu’un petit, et c’est beaucoup. Elle et lui sont tiraillés par trois choses : le travail de la nage, l’allaitement et la fatale nécessité de remonter ! L’éducation, c’est un combat. Battu, roulé de l’Océan, l’enfant prend le lait comme au vol, quand la mère peut se coucher de côté. Elle est, dans ce devoir, admirable d’élan. Elle sait qu’en son petit effort pour têter, il lâcherait prise. Dans cet acte où la femme est passive, laisse faire l’enfant, la baleine est active. Profitant du moment, par un puissant piston elle lui lance un tonneau de lait.

Le mâle la quitte peu. Leur embarras est grand,