Page:Michelet - La Mer, 1875.djvu/265

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ils y aiment ; blessés, ils y viennent mourir. Ils y mènent leurs femelles enceintes, les couchent sur les algues et les nourrissent de poisson. Ils sont doux, bons voisins, se défendent l’un l’autre. Seulement, au temps d’amour, ils délirent et se battent. Chacun a trois ou quatre épouses, qu’il établit à terre sur un rocher mousseux d’étendue suffisante. C’est son quartier à lui, et il ne souffre pas qu’on empiète, fait respecter son droit d’occupation. Les femelles sont douces et sans défense. Si on leur fait du mal, elles pleurent, s’agitent douloureusement avec des regards de désespoir.

Elles portent neuf mois, et élèvent l’enfant cinq ou six mois, lui enseignant à nager, à pêcher, à choisir les bons aliments. Elles le garderaient bien plus, si le mari n’était jaloux. Il le chasse, craignant que la trop faible mère ne lui donne un rival en lui.



Une si courte éducation a limité sans doute les progrès que le phoque aurait faits. La maternité n’est complète que chez les Lamantins, excellente tribu, où les parents n’ont pas le courage de renvoyer l’enfant. La mère le garde très longtemps.