Page:Michelet - La Mer, 1875.djvu/307

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

L’art ancien des augures, la science des présages, nullement méprisables, reçoit dans cet excellent livre un heureux renouvellement.

Le coucher du soleil n’est point indifférent. S’il est rouge, si la mer en garde des lames sanglantes, l’autre océan, celui de l’air, te prépare un orage. Un anneau autour du soleil, une lueur rouge dans un cercle pâle, des étoiles changeantes et qui semblent descendre, ce sont des signes d’un travail menaçant dans la région supérieure.

C’est bien pis si tu vois, sur un ciel sale, de petits nuages filer comme des flèches d’un pourpre sombre, si des masses compactes se mettent à figurer des édifices étranges, des arcs-en-ciel brisés, des ponts en ruines et cent autres caprices. Tu peux croire que déjà le drame a commencé là-haut. Tout est calme, mais à l’horizon tremblent des éclairs pâles. Tout est calme, et, dans ce silence, on surprend par instants des bruits roulants, qui s’arrêtent soudain. La mer vient au rivage plaintive et gonflée de soupirs. Parfois même, du fond, monte un bruit sourd… Ici sois attentif : « C’est l’appel de la mer. » (Locution anglaise.)

L’oiseau est averti. S’il n’est pas loin des côtes, on le voit (cormoran, goéland ou mouette) qui regagne à tire-d’aile, quelque trou de rocher. En haute mer, ton vaisseau leur sert d’île et