Page:Michelet - La Pologne martyr, Dentu, 1863.djvu/60

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lequel juge les causes spirituelles, mais lui-même il fait ce serment : ". le czar est notre juge. " De sorte qu’en réalité le vrai pape est le czar.

Un auteur important en cette matière, Tolstoï, le dit expressément : " l’empereur est le chef né de la religion. "

Dans le czar est le faux du faux, le mensonge suprême qui couronne tous les mensonges.

Providence visible, père des pères, protecteur des serfs !… Nous expliquerons ailleurs, dans son développement diabolique, cette effroyable paternité :

qu’il nous suffise ici de montrer ce qu’elle a, de faux, dans son attribut le moins faux, le moins contestable, la force et la puissance ; d’expliquer que cette puissance elle-même, si roide, si dure, et qui paraît si forte, est très faible en réalité.

Deux choses naturelles ont amené cette chose dénaturée, ce monstre de gouvernement. L’instabilité désolante que les invasions éternelles des cavaliers tartares mettaient dans l’existence des Russes leur a fait désirer la stabilité, le repos sous un maître. Mais, d’autre part, la mobilité intrinsèque de la race russe, sa fluidité excessive, rendaient ce repos difficile. Incertaine comme l’eau, elle ne put être retenue que parle procédé dont use la nature pour fixer l’eau, par la constriction, le resserrement dur, brusque, violent, qui, aux premières nuits d’hiver, met l’eau en glace, le fluide en cristal, aussi dur que le fer.