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HISTOIRE DE FRANCE

c’est-à-dire l’Église ; l’Église séculière, les prêtres, le Pape ; l’Église régulière, les moines, les Templiers.

La mort scandaleusement prompte de Benoît XI fit tomber l’Église dans la main de Philippe-le Bel ; elle le mit à même de faire un pape, de tirer la papauté de Rome, de l’amener en France, pour, en cette geôle, la faire travailler à son profit, lui dicter des bulles lucratives, exploiter l’infaillibilité, constituer le Saint-Esprit comme scribe et percepteur pour la maison de France.

Après la mort de Benoît, les cardinaux s’étaient enfermés en conclave à Pérouse. Mais les deux partis, le français et l’anti-français, se balançaient si bien qu’il n’y avait pas moyen d’en finir. Les gens de la ville, dans leur impatience, dans leur furie italienne de voir un pape fait à Pérouse, n’y trouvèrent autre remède que d’affamer les cardinaux. Ceux-ci convinrent qu’un des deux partis désignerait trois candidats, et que l’autre parti choisirait. Ce fut au parti français à choisir, et il désigna un Gascon, Bertrand de Gott, archevêque de Bordeaux. Bertrand s’était montré jusque-là ennemi du roi, mais on savait qu’il était avant tout ami de son intérêt, et l’on espérait bien le convertir.

Philippe, instruit par ses cardinaux et muni de leurs lettres, donne rendez-vous au futur élu près de Saint-Jean-d’Angely, dans une forêt. Bertrand y court plein d’espérance. Villani parle de cette entrevue secrète comme s’il y était. Il faut lire ce récit d’une maligne naïveté :

« Ils entendirent ensemble la messe et se jurèrent