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HISTOIRE DE FRANCE

France, à Vienne, en Dauphiné, sur terre d’Empire.

La commission, composée principalement d’évêques[1], était présidée par Gilles d’Aiscelin, archevêque de Narbonne, homme doux et faible, de grandes lettres et de peu de cœur. Le roi et le pape, chacun de leur côté, croyaient cet homme tout à eux. Le pape crut calmer plus sûrement encore le mécontentement de Philippe en adjoignant à la commission le confesseur du roi, moine dominicain et grand inquisiteur de France, celui qui avait commencé le procès avec tant de violence et d’audace.

Le roi ne réclama pas. Il avait besoin du pape. La mort de l’empereur Albert d’Autriche (1er mai 1308) offrait à la maison de France une haute perspective. Le frère de Philippe, Charles-de-Valois, dont la destinée était de demander tout et de manquer tout, se porta pour candidat à l’Empire. S’il eût réussi, le pape devenait à jamais serviteur et serf de la maison de France. Clément écrivit pour Charles-de-Valois ostensiblement, secrètement contre lui.

Dès lors il n’y avait plus de sûreté pour le pape sur les terres du roi. Il parvint à sortir de Poitiers, et se jeta dans Avignon (mars 1309). Il s’était engagé à ne pas quitter la France et, de cette façon, il ne violait pas, il éludait sa promesse. Avignon c’était la France, et ce n’était pas la France. C’était une frontière, une position mixte, une sorte d’asile, comme fut Genève pour Calvin, Ferney pour Voltaire. Avignon dépendait de plusieurs et de personne. C’était terre d’Empire, un

  1. App. 70.