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DESTRUCTION DE L’ORDRE DU TEMPLE

solennel encore par la gravité des matières que par le nombre des assistants.

D’abord on devait parler de la délivrance des saints lieux. Tout concile en parlait, chaque prince prenait la croix, et tous restaient chez eux. Ce n’était qu’un moyen de tirer de l’argent[1].

Le concile avait à régler deux grandes affaires : celle de Boniface, et celle du Temple. Dès le mois de novembre, neuf chevaliers se présentèrent aux prélats, s’offrant bravement à défendre l’ordre, et déclarant que quinze cents ou deux mille des leurs étaient à Lyon ou dans les montagnes voisines, tout prêts à les soutenir. Effrayé de cette déclaration, ou plutôt de l’intérêt qu’inspirait le dévouement des neuf, le pape les fit arrêter[2].

Dès lors il n’osa plus rassembler le concile. Il tint les évêques inactifs tout l’hiver, dans cette ville étrangère, loin de leur pays et de leurs affaires, espérant sans doute les vaincre par l’ennui et les pratiquant un à un.

Le concile avait encore un objet, la répression des mystiques, béghards et franciscains spirituels. Ce fut une triste chose de voir devant le pape de Philippe-le-Bel, aux genoux de Bertrand de Gott, le pieux et enthousiaste Ubertino, le premier auteur connu d’une Imitation de Jésus-Christ[3]. Toute la grâce qu’il deman-

  1. App. 87.
  2. Voy. la lettre de Clément V au roi de France, 11 nov. 1311.
  3. L’Imitation de Jésus-Christ est le sujet commun d’une foule de livres au quatorzième siècle. Le livre que nous connaissons sous ce titre est venu le dernier ; c’est le plus raisonnable de tous, mais non peut-être le plus éloquent. App. 88.