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HISTOIRE DE FRANCE

la place du parvis de Notre-Dame, le lundi après la Saint-Grégoire, ils furent condamnés à être emprisonnés pour toujours et murés. Mais comme les cardinaux croyaient avoir mis fin à l’affaire, voilà que tout à coup, sans qu’on pût s’y attendre, deux des condamnés, le maître d’Outre-mer et le maître de Normandie, se défendant opiniâtrement contre le cardinal qui venait de parler et contre l’archevêque de Sens, en reviennent à renier leur confession et tous leurs aveux précédents, sans garder de mesure, au grand étonnement de tous. Les cardinaux les remirent au prévôt de Paris, qui se trouvait présent, pour les garder jusqu’à ce qu’ils en eussent plus pleinement délibéré le lendemain. Mais dès que le bruit en vint aux oreilles du roi, qui était alors dans son palais royal, ayant communiqué avec les siens, sans appeler les clercs, par un avis prudent, vers le soir du même jour, il les fit brûler tous deux sur le même bûcher dans une petite île de la Seine, entre le jardin royal et l’église des Frères Ermites de Saint-Augustin. Ils parurent soutenir les flammes avec tant de fermeté et de résolution, que la constance de leur mort et leurs dénégations finales frappèrent la multitude d’admiration et de stupeur. Les deux autres furent enfermés, comme le portait leur sentence[1]. »

Cette exécution, à l’insu des juges, fut évidemment un assassinat. Le roi, qui, en 1310, avait au moins réuni un concile pour faire périr les cinquante-quatre, dédaigna ici toute apparence de droit et n’employa que

  1. App. 96.