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HISTOIRE DE FRANCE

nier, et qui se faisait garder par ses amis, cierges allumés[1].

Le premier de ces vilains procès de sorcellerie, où il n’y avait des deux côtés que malhonnêtes gens, est celui de Guichard, évêque de Troyes, accusé d’avoir, par engin et maléfice, procuré la mort de la femme de Philippe-le-Bel. Cette mauvaise femme, qui avait recommandé l’égorgement des Flamandes (voyez plus haut), est celle aussi qui, selon une tradition plus célèbre que sûre, se faisait amener, la nuit, des étudiants à la tour de Nesle, pour les faire jeter à l’eau quand elle s’en était servie. Reine de son chef pour la Navarre, comtesse de Champagne, elle en voulait à l’évêque, qui pour finance avait sauvé un homme qu’elle haïssait. Elle faisait ce qu’elle pouvait pour ruiner Guichard. D’abord, elle l’avait fait chasser du conseil et forcé de résider en Champagne. Puis elle avait dit qu’elle perdrait son comté de Champagne, ou lui son évêché. Elle le poursuivait pour je ne sais quelle restitution. Guichard demanda d’abord à une sorcière un moyen de se faire aimer de la reine, puis un moyen de la faire mourir. Il alla, dit-on, la nuit chez un ermite pour maléficier la reine et l’envoûter. On fit une reine de cire, avec l’assistance d’une sage-femme ; on la baptisa Jeanne, avec parrain et marraine, et on la piqua d’aiguilles. Cependant la vraie Jeanne ne mourait pas. L’évêque revint plus d’une fois à l’ermitage, espérant s’y mieux prendre. L’ermite eut peur, se sauva et dit

  1. Mém. de Luther.