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HISTOIRE DE FRANCE

pourpre et l’hermine. Ce n’est pas, comme il semble, l’ombre, l’effigie du roi ; c’est plutôt sa pensée, sa volonté constante, immuable et vraiment royale. Le roi veut que la justice suive son cours : « Non contrestant toutes concessions, ordonnances, et lettres royaux à ce contraire. » Ainsi le roi se défie du roi, il se reconnaît mieux en son parlement qu’en lui-même. Il distingue en lui un double caractère ; il se sent roi, et il se sent homme, et le roi ordonne de désobéir à l’homme.

Beaucoup de textes d’ordonnances en ce sens honorent la sagesse des conseillers qui les dictèrent. Le roi cherche à mettre une barrière à sa libéralité. Il exprime la crainte que l’on n’arrache des dons excessifs à sa faiblesse, à son inattention ; que pendant qu’il dort ou repose, le privilège et l’usurpation ne soient que trop bien éveillés[1].

Ainsi, en 1318, il parle de certains droits féodaux : « … lesquels on nous demande souvent, et sont de plus grande valeur que nous ne croyons, nous devons être avisés, si quelqu’un nous les demande[2] ».

Ailleurs, il recommande aux receveurs de n’avertir personne des recettes extraordinaires, ou « aventures qui nous échoiront, à ce que nous ne puissions être requis de les donner ».

Ces aveux de faiblesse et d’ignorance que les conseillers du roi lui faisaient faire, pour être si naïfs, n’en sont pas moins respectables. Il semble que la royauté

  1. App. 133.
  2. App. 134.