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L’ANGLETERRE. — PHILIPPE-DE-VALOIS

l’intérêt qu’on payait aux foires[1]. Puis vint Louis-Hutin, qui mit des droits sur tout ce qui pouvait s’acheter ou se vendre. Cela suffisait pour fermer les comptoirs de Troyes. Il n’avait pas besoin d’interdire, comme il fit, tout trafic « avec les Flamands, les Génois, les Italiens et les Provençaux ».

Plus tard, le roi de France s’aperçut qu’il avait tué sa poule aux œufs d’or. Il abaissa les droits, rappela les marchands[2]. Mais il leur avait lui-même enseigné à prendre une autre route. Ils allèrent désormais en Flandre par l’Allemagne, ou par mer. Ce fut pour Venise l’occasion d’une navigation plus hardie, qui, par l’Océan, la mit en rapport direct avec les Flamands et les Anglais.

Le royaume de France, dans sa grande épaisseur, restait presque impénétrable au commerce. Les routes étaient trop dangereuses, les péages trop nombreux. Les seigneurs pillaient moins ; mais les agents du roi les avaient remplacés. Pillé comme un marchand, était un mot proverbial[3]. La main royale couvrait

  1. Les foires de Champagne étaient plus anciennes que le comté même. Il en est fait mention dès l’an 427, dans une lettre de Sidoine Apollinaire à saint Loup. Elles se perpétuèrent toujours florissantes, sans que personne gênât leurs transactions. L’ordonnance de Philippe-le-Bel est le titre royal le plus ancien qui les concerne.
  2. Voyez les ordonnances de Charles-le-Bel et de Philippe-de-Valois. Ce qui acheva la ruine des foires de Champagne, ce fut la rivalité de Lyon. Quand aux tracasseries fiscales s’ajoutèrent les alarmes et les pillages de la guerre intérieure, Troyes fut désertée, et Lyon s’ouvrit comme un asile au commerce. Il fallut abolir les foires de Lyon pour rendre quelque vie aux foires de Champagne. En 1486, des quatre foires de Lyon, deux furent transférées à Bourges et deux à Troyes ; mais elles tombèrent dès que Lyon eut obtenu de rouvrir ses marchés.
  3. « … Qu’ils en fissent leur profit comme d’un marchand. » (Comines.)