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HISTOIRE DE FRANCE

faisait demander au roi d’envoyer la troisième au secours. Édouard répondit qu’il voulait laisser l’enfant gagner ses éperons, et que la journée fût sienne.

Le roi d’Angleterre, qui dominait toute la bataille de la butte d’un moulin, voyait bien que les Français allaient être écrasés[1]. Les uns avaient trébuché dans le premier désordre parmi les Génois ; les autres, pénétrant au cœur de l’armée anglaise, se trouvaient entourés. La pesante armure que l’on commençait à porter alors, ne permettait pas aux cavaliers, une fois tombés, de se relever. Les coutilliers de Galles et de Cornouailles venaient avec leurs couteaux, et les tuaient sans merci, quelque grands seigneurs qu’ils fussent. Philippe-de-Valois fut témoin de cette boucherie. Son cheval avait été tué. Il n’avait plus que soixante hommes autour de lui, mais il ne pouvait s’arracher du champ de bataille. Les Anglais, étonnés de leur victoire, ne bougeaient d’un pas ; autrement ils l’eussent pris. Enfin Jean de Hainaut saisit le cheval du roi par la bride et l’entraîna.

Les Anglais, faisant la revue du champ de bataille et le compte des morts, trouvèrent onze princes, quatre-vingts seigneurs bannerets, douze cents chevaliers, trente mille soldats. Pendant qu’ils comptaient, arrivèrent les communes de Rouen et de Beauvais, les troupes de l’archevêque de Rouen et du grand prieur de France. Les pauvres gens, qui ne savaient rien de la bataille, venaient augmenter le nombre des morts.

  1. « Et lors, après la bataille, s’avala le roi Édouard, qui encore tout ce jour n’avoit mis son bassinet. » (Froissart.)