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HISTOIRE DE FRANCE

L’enivrement fut tel qu’ils abandonnèrent sans mot dire à Philippe-le-Bel leurs frères, les Templiers ; ces chevaliers étaient généralement les cadets de la noblesse. Elle fit bon marché des moines chevaliers, tout comme des autres moines ou prêtres. Toujours elle aida les rois contre les papes. Ces décimes arrachés au clergé, sous semblant de croisade ou autre prétexte, les nobles en avaient banne part[1]. Le temps venait pourtant où le noble, après avoir aidé le roi à manger le prêtre, pourrait aussi avoir son tour.

À Courtrai, les nobles alléguèrent leur héroïque étourderie, le fossé des Flamands. À Mons-en-Puelle, à Cassel, deux faciles massacres relevèrent leur réputation. Pendant plusieurs années, ils accusèrent le roi qui leur défendait de vaincre. À Créci, ils étaient à même ; toute la chevalerie était là réunie, toute bannière flottait au vent, ces fiers blasons, lions, aigles, tours, besans des croisades, tout l’orgueilleux symbolisme des armoiries. En face, sauf trois mille hommes d’armes, c’étaient les va-nu-pieds des communes anglaises, les rudes montagnards de Galles, les porchers de l’Irlande[2] ; races aveugles et sauvages qui ne savaient ni français, ni anglais, ni chevalerie. Ils n’en visèrent pas moins bien aux nobles bannières ; ils n’en tuèrent que plus. Il n’y avait pas de langue commune pour prier ou traiter. Le Welsh ou l’Irishman n’enten-

  1. App. 179.
  2. Sur trente-deux mille hommes dont se composait l’armée d’Édouard, Froissart dit expressément qu’il n’y avait que quatorze mille Anglais (4.000 hommes d’armes, 10.000 archers). Les autres dix-huit mille étaient Gallois et Irlandais (12.000 Gallois, 6.000 Irlandais).