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HISTOIRE DE FRANCE

romaine par le tribun Rienzi. Pétrarque ne douta point de la réunion prochaine de l’Italie, du monde, sous le bon état. Il chanta d’avance les vertus du libérateur et la gloire de la nouvelle Rome. Cependant Rienzi menaçait de mort les amis de Pétrarque, les Colonna. Celui-ci refusa longtemps d’y croire ; il écrivit au tribun une lettre triste et inquiète, où il le prie de démentir ces mauvais bruits[1]

La chute du tribun lui ôtant l’espoir que l’Italie pût se relever elle-même, il transporta son facile enthousiasme à l’empereur Charles IV, qui alors entrait en Italie. Pétrarque se trouva sur son passage ; il lui présenta les médailles d’or de Trajan et d’Auguste ; il le somma de se souvenir de ces grands empereurs. Ce Trajan, cet Auguste avait passé les Alpes avec deux ou trois cents cavaliers. Il venait vendre les droits de l’Empire en Italie, avant de les sacrifier en Allemagne dans sa bulle d’or. Le pacifique et économe empereur, avec son cortège mal monté, était comparé par les Italiens à un marchand ambulant qui va à la foire[2].

Le triste Pétrarque, trompé tant de fois[3], se réfugia chaque jour davantage dans la lointaine antiquité. Il se mit, déjà vieux, à apprendre la langue d’Homère, à épeler l’Iliade. Il faut voir quels furent ses transports

  1. App. 188.
  2. Il tira d’eux quelque argent, et s’en retourna plus vite qu’il n’était venu. Les villes fermaient toutes leurs portes ; on lui permit avec peine de reposer une nuit à Crémone.
  3. Ce qu’il y avait de plus humiliant, c’est que le malicieux empereur avait donné la couronne poétique à un autre que Pétrarque.