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ÉTATS GÉNÉRAUX

de leur loyauté. À peine doute-t-il de leur salut[1].

L’effroi était tel à Paris que les bourgeois avaient offert à Notre-Dame une bougie qui, disait-on, avait la longueur du tour de la ville[2]. On n’osait plus sonner dans les églises, si ce n’est à l’heure du couvre-feu, de crainte que les habitants en sentinelle sur les murailles n’entendissent venir l’ennemi. Combien la terreur n’était-elle pas plus grande dans les campagnes ! Les paysans ne dormaient plus. Ceux des bords de la Loire passaient les nuits dans les îles ou dans des bateaux arrêtés au milieu du fleuve. En Picardie les populations creusaient la terre et s’y réfugiaient. Le long de la Somme, de Péronne à l’embouchure, on comptait encore au dernier siècle trente de ces souterrains[3]. C’est là qu’on pouvait avoir quelque impression de l’horreur de ces temps. C’étaient de longues allées voûtées de sept ou huit pieds de large, bordées de vingt ou trente chambres avec un puits au centre pour avoir à la fois de l’air et de l’eau. Autour du puits de grandes chambres pour les bestiaux. Le soin et la solidité qu’on remarque dans ces constructions indique assez que c’était une des demeures ordinaires de la triste population de ces temps. Les familles s’y

    seigneur dedans, et le mirent en prison en son châtel même, et le tinrent si longtemps, qu’il se rançonna atout vingt-quatre mille écus, et encore détint ledit brigand le châtel. Et par ses prouesses le roi de France le voulut avoir de lez lui, et acheta son châtel vingt mille écus, et fut huissier d’armes du roi de France. Et étoit appelé ce brigand Bacon. »

  1. « Le coursier de Croquard trébucha et rompit à son maître le col. Je ne sais que son avoir devint ni qui eut l’àme, mais je sais que Croquard fina ainsi. » (Froissart.)
  2. Chroniques de Saint-Denis.
  3. App. 213.