Page:Michelet - OC, Histoire de France, t. 3.djvu/338

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
328
HISTOIRE DE FRANCE

à vous qu’en monte de savoir ? je suis ci pour prendre garde de la ville dont j’ai le gouvernement. » — « Par Dieu, répondit Jean Maillart, il ne va mie ainsi ; mais n’êtes ci à cette heure pour nul bien ; et je le vous montre, dit-il à ceux qui étoient de-lez (près) lui, comment il tient les clefs des portes en ses mains pour trahir la ville. » Le prévôt des marchands s’avança et dit : « Vous mentez. » — « Par Dieu ! répondit Jean Maillart, traître, mais vous mentez ! » Et tantôt férit à lui et dit à ses gens : « À la mort, à la mort tout homme de son côté, car ils sont traîtres. » Là eut grand hutin et dur ; et s’en fût volontiers le prévôt des marchands fui s’il eût pu ; mais il fut si hâté qu’il ne put. Car Jean Maillart le férit d’une hache sur la tête et l’abattit à terre, quoique ce fût son compère, ni ne se partit de lui jusqu’à ce qu’il fût occis et six de ceux qui là étoient, et le demeurant pris et envoyé en prison[1]. »

Selon une version plus vraisemblable, Marcel et cinquante-quatre de ses amis qui étaient venus avec lui tombèrent frappés par des gardes obscurs de la porte Saint-Antoine[2].

Cependant les meurtriers s’en allèrent, criant par la ville et éveillant le peuple. Le matin, tous étaient assemblés aux halles, où Maillart les harangua. Il leur conta comment cette même nuit, la ville devait être courue et détruite, si Dieu ne l’eût éveillé lui et ses amis, et ne leur eût révélé la trahison. La foule apprit

  1. Froissart.
  2. Voy. Perrens, Étienne Marcel (1860).