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HISTOIRE DE FRANCE

par où nous voyons l’Océan, crever les yeux de la France.

Le roi Jean avait signé tout, et promis de plus quatre millions d’écus d’or pour sa rançon. Le dauphin, qui ne pouvait se dépouiller ainsi, fit refuser le traité par une assemblée de quelques députés des provinces, qu’il appela États généraux. Ils répondirent « que le roi Jean demeurât encore en Angleterre, et que quand il plairoit à Dieu, il y pourvoiroit de remède[1] ».

Le roi d’Angleterre se mit en campagne, mais cette fois pour conquérir la France. Il voulait d’abord aller à Reims, et s’y faire sacrer[2]. Tout ce qu’il y avait de noblesse en Angleterre l’avait suivi à cette expédition. Une autre armée l’attendait à Calais, sur laquelle il ne comptait pas. Une foule d’hommes d’armes et de seigneurs d’Allemagne et des Pays-Bas, entendant dire qu’il s’agissait d’une conquête, et espérant un partage comme celui de l’Angleterre par les compagnons de Guillaume-le-Conquérant, avaient voulu être aussi de la fête. Ils croyaient déjà « tant gagner qu’ils ne seroient jamais pauvres[3] ». Ils attendirent Édouard jusqu’au 28 octobre, et il eut grand’peine à s’en débarrasser. Il fallut qu’il les aidât à retourner chez eux, qu’il leur prêtât de l’argent, à ne jamais rendre.

Édouard avait amené avec lui six mille gens d’armes couverts de fer, son fils, ses trois frères, ses princes, ses grands seigneurs. C’était comme une émigration des Anglais en France. Pour faire la guerre conforta-

  1. Froissart.
  2. Contin. G. de Nangis.
  3. Froissart.