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ÉTATS GÉNÉRAUX

sueur, de gémissements et de larmes, on ne le saura jamais. Le premier (24 octobre 1360) est la quittance des dépens de garde du roi Jean, à dix mille réaux par mois[1] : cette noble hospitalité, tant vantée des historiens, Édouard se la faisait payer ; le geôlier, avant la rançon, se faisait compter la pistole. Puis vient une effroyable quittance de 400.000 écus d’or (même date). Puis, quittance de 200.000 écus d’or (décembre). Autre de 100.000 (1361, Toussaint) ; autre de 200.000 encore, et de plus, de 57.000 moutons d’or, pour compléter les 200.000 promis par la Bourgogne (21 février). — En 1362 : 198.000 ; 30.000 ; 60.000 ; 200.000. — Les payements se continuent jusqu’en 1368. — Mais nous sommes bien loin d’avoir toutes les quittances. Les rançons de la noblesse montaient peut-être à une somme aussi considérable.

Le premier payement n’aurait pu se faire, si le roi n’eût trouvé une honteuse ressource. En même temps qu’il donnait des provinces, il donna un de ses enfants. Les Visconti, les riches tyrans de Milan, avaient la fantaisie d’épouser une fille de France. Ils imaginaient que cela les rendrait plus respectables en Italie. Ce féroce Galéas qui allait à la chasse aux hommes dans les rues, qui avait jeté des prêtres tout vivants dans un four, demanda pour son fils, âgé de dix ans, une fille de Jean qui en avait onze. Au lieu de recevoir une dot, il en donnait une : trois cent mille florins en pur don, et autant pour un comté en Champagne. Le

  1. Archives, section hist., J, 639-640. — Voir la Rançon du roi Jean par M. Dessalles, curieux et savant.