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ÉTATS GÉNÉRAUX

compassion que nous avons de notre peuple, nous nous contenterons ; et elle sera levée seulement jusqu’à la perfection et l’entérinement de la paix. »

Quelque douce et paternelle que fût la demande, le peuple n’en était pas plus en état de payer : tout argent avait disparu. Il fallut s’adresser aux usuriers, aux juifs, et cette fois leur donner un établissement fixe. On leur assura un séjour de vingt années. Un prince du sang était établi gardien de leurs privilèges, et il se chargeait spécialement de les faire payer de leurs dettes. Ces privilèges étaient excessifs. Nous en parlerons ailleurs. Pour les acquérir, ils devaient payer vingt florins en rentrant dans ce royaume, et de plus sept par an. Un Manassé, qui prenait en ferme toute la juiverie, devait avoir pour sa peine un énorme droit de deux florins sur les vingt, et d’un par an sur les sept.

Les tristes et vides années qui suivent, 1361, 1362, 1363, ne présentent au dehors que les quittances de l’Anglais, au dedans que la cherté des vivres, les ravages des brigands, la terreur d’une comète, une grande et effroyable mortalité. Cette fois, le mal atteignait les hommes, les enfants, plutôt que les vieillards et les femmes. Il frappait de préférence la force et l’espoir des générations. On ne voyait que mères en pleurs, que veuves, que femmes en noir[1].

La mauvaise nourriture était pour beaucoup dans l’épidémie. On n’amenait presque rien aux villes. On

  1. Contin. G. de Nangis.