CHAPITRE IV
Le jeune roi était né vieux. Il avait de bonne heure beaucoup vu, beaucoup souffert. De sa personne, il était faible et malade. Tel royaume, tel roi. On disait que Charles-le-Mauvais l’avait empoisonné ; il en était resté pâle, et avait une main enflée, ce qui l’empêchait de tenir la lance. Il ne chevauchait guère, mais plutôt se tenait à Vincennes, à son hôtel de Saint-Paul, à sa royale librairie du Louvre. Il lisait, il oyait les habiles, il avisait froidement. On l’appela le Sage, c’est-à-dire le lettré, le clerc, ou bien encore l’avisé, l’astucieux. Voilà le premier roi moderne, un roi assis, comme l’effigie royale est sur les sceaux. Jusque-là on se figurait qu’un roi devait monter à cheval. Philippe-le-Bel lui-même, avec son chancelier Pierre Flotte, était allé se faire battre à Courtrai. Charles V combattit mieux de sa chaise. Conquérant dans sa chambre, entre ses procureurs, ses juifs et ses astrologues, il défit les