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EXPULSION DES ANGLAIS

avec le tact anglais, ce moment de mauvaise humeur pour mettre sur leurs terres un fouage de dix sols par feu[1] ; au lieu de les payer, il leur demandait de l’argent ; un fouage aux maigres populations des landes, aux pauvres chevriers des montagnes ; un fouage à cette brave petite noblesse qui ne fut jamais riche qu’en cadets et en bâtards. Le prince avait convoqué les États à Niort, dans l’espoir de convertir les Gascons par le bon exemple des Poitevins et des Limousins. Ils n’y furent pas sensibles. Il eut beau transférer les États à Angoulême, à Poitiers, à Bergerac. Ils n’eurent pas plus envie de payer à Bergerac qu’à Niort.

Et non seulement ils ne payèrent pas, mais ils allèrent trouver le roi de France, lui disant avec la vivacité de leur pays qu’ils voulaient justice, que sa cour était la plus juste du monde, que s’il ne recevait pas leur appel, ils iraient chercher un autre seigneur[2]. Le roi, qui n’était pas prêt à la guerre, tâchait de les contenir. Il ne les soutenait pas, ne les renvoyait pas ; mais il les gardait à Paris, les choyait, les défrayait[3]. Il y avait de belles fortunes à faire auprès de ce bon roi. L’Anglais ne payait pas, même après ; lui, il payait d’avance. Il donnait aux petits chevaliers, non pas de l’argent seulement, mais des établissements, des fortunes de prince. Il était le père des Bretons et des Gascons. Il ne leur gardait pas rancune. Plus on

  1. App. 251.
  2. Froissart.
  3. « Et vous mettrons à accord avec notre très cher neveu le prince de Galles, qui espoir (peut-être) n’est mie bien conseillé ». (Idem.)