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EXPULSION DES ANGLAIS

toute la chrétienté en opposition avec la France. La fortune s’était jouée de la sagesse. La reine Jeanne de Naples, cousine et alliée du roi, fut peu après déposée par Urbain, renversée par son fils adoptif Charles de Duras, étranglée en punition d’un crime qui datait de trente-cinq ans.

Toute l’Europe remuait. Le mouvement était partout ; mais les causes infiniment diverses. Les Lollards d’Angleterre semblaient mettre en péril l’Église, la royauté, la propriété même. À Florence, les Ciompi faisaient leur révolution démocratique[1]. La France elle-même semblait échapper à Charles V. Trois provinces, les plus excentriques, mais les plus vitales peut-être, se révoltèrent.

Le Languedoc éclata d’abord. Charles V, préoccupé du Nord, et regardant toujours vers l’Angleterre, avait fait d’un de ses frères une sorte de roi du Languedoc. Il avait confié cette province au duc d’Anjou. Par le duc d’Anjou il semblait près d’atteindre l’Aragon et Naples, tandis que par son autre frère, le duc de Bourgogne, il allait occuper la Flandre. Mais la France, misérablement ruinée, n’était guère capable de conquêtes lointaines. La fiscalité, si dure alors dans tout le royaume, devint en Languedoc une atroce tyrannie. Ces riches municipes du Midi, qui ne prospéraient que par le commerce et la liberté, furent taillés sans merci comme l’eût été un fief du Nord. Le prince féodal ne voulait rien comprendre à leurs privilèges.

  1. Voy. le récit d’Edgar Quinet, Révolutions d’Italie, t. IV des Œuvres complètes (1858).