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HISTOIRE DE FRANCE

-vingts ans après, Charles VI vit les éperons et fit massacrer tous les habitants.

Cette terrible défaite, qui avait exterminé toute l’avant-garde de l’armée de France, c’est-à-dire la plupart des grands seigneurs, cette bataille qui ouvrait tant de successions, qui faisait tomber tant de fiefs à des mineurs sous la tutelle du roi, affaiblit pour un moment sa puissance militaire sans doute, mais elle ne lui ôta rien de sa vigueur contre le pape. En un sens, la royauté en était plutôt fortifiée. Qui sait si le pape n’eût trouvé moyen de tourner contre le roi quelques-uns de ces grands feudataires qui avaient signé, il est vrai, la fameuse lettre ; mais qui, revenant tous de la guerre de Flandre, revenant riches et vainqueurs, eussent moins craint la royauté ?

Il renonçait à confondre les deux puissances, comme il avait paru vouloir le faire jusque-là. Mais lorsqu’on eut appris à Rome la défaite de Philippe à Courtrai, la cour pontificale changea de langage ; un cardinal écrivit au duc de Bourgogne que le roi était excommunié pour avoir défendu aux prélats de venir à Rome, que le pape ne pouvait écrire à un excommunié, qu’il fallait avant tout qu’il fît pénitence. Cependant les prélats, ralliés au pape par la défaite du roi, partirent pour Rome au nombre de quarante-cinq. C’était comme une désertion en masse de l’Église gallicane. Le roi perdait d’un coup tous ses évêques, de même qu’il venait de perdre presque tous ses barons à Courtrai[1].

  1. App. 27.