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Page:Michelet - OC, Histoire de France, t. 5.djvu/129

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PROCÈS ET MORT DE LA PUCELLE

restait-elle une autorité, si elle abdiquait sa juridiction, si elle ne punissait ? L’Église militante est une Église armée, armée du glaive à deux tranchants, contre qui ? Apparemment contre les indociles.

Terrible était cette Église dans la personne des raisonneurs, des scolastiques, des ennemis de l’inspiration ; terrible et implacable, si elle était représentée par l’évèque de Beauvais. Mais au-dessus de l’évêque n’y avait-il donc pas d’autres juges ? Le parti épiscopal et universitaire, qui prêchait la suprématie des conciles, pouvait-il, dans ce cas particulier, ne pas reconnaître comme juge suprême son concile de Bâle, qui allait ouvrir ? D’autre part, l’inquisition papale, le dominicain qui en était le vicaire, ne contestait pas sans doute que la juridiction du pape ne fut supérieure à la sienne, qui en émanait.

Un légiste de Rouen, ce même Jean de la Fontaine, ami de Cauchon et hostile à la Pucelle, ne crut pas en conscience pouvoir laisser ignorer à une accusée sans conseil qu’il y avait des juges d’appel, et que, sans rien sacrifier sur le fond, elle pouvait y avoir recours. Deux moines crurent aussi que le droit suprême du pape devait être réservé. Quelque peu régulier qu’il fût que des assesseurs pussent visiter isolément et conseiller l’accusée, ces trois honnêtes gens, qui voyaient toutes les formes violées par Cauchon pour le triomphe de l’iniquité, n’hésitèrent pas à les violer eux-mêmes dans l’intérêt de la justice. Ils allèrent intrépidement à la prison, se firent ouvrir et lui conseillèrent l’appel. Elle appela le lendemain au pape et au