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Page:Michelet - OC, Histoire de France, t. 5.djvu/131

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PROCÈS ET MORT DE LA PUCELLE

Cauchon devait, ce semble, être mieux soutenu des théologiens. Après les premiers interrogatoires, armé des réponses que Jeanne avait données contre elle, il s’enferma avec ses intimes, et, s’aidant surtout de la plume d’un habile universitaire de Paris, il tira de ces réponses un petit nombre d’articles, sur lesquels on devait prendre l’avis des principaux docteurs et des corps ecclésiastiques. C’était l’usage détestable, mais enfin (quoi qu’on ait dit) l’usage ordinaire et régulier des procès d’inquisition. Ces propositions extraites des réponses de la Pucelle, et rédigées sous forme générale, avaient une fausse apparence d’impartialité. Dans la réalité, elles n’étaient qu’un travestissement de ses réponses, et ne pouvaient manquer d’être qualifiées par les docteurs consultés selon l’intention hostile de l’inique rédacteur[1].

Quelle que fût la rédaction, quelque terreur qui pesât sur les docteurs consultés, leurs réponses furent loin d’être unanimes contre l’accusée. Parmi ces docteurs, les vrais théologiens, les croyants sincères, ceux qui avaient conservé la foi ferme du moyen âge, ne pouvaient rejeter si aisément les apparitions, les visions. Il eût fallu douter aussi de toutes les merveilles de la vie des saints, discuter toutes les légendes.

  1. Elles furent communiquées d’abord à quelques-uns des assesseurs, à ceux que Cauchon croyait les plus sûrs. Ceux-ci, toutefois, crurent devoir ajouter un correctif aux articles : « Elle se soumet à l’Église militante, en tant que cette Église ne lui impose rien de contraire à ses révélations faites et à faire. » Cauchon crut, non sans quelque raison, qu’une telle soumission conditionnelle n’était pas une soumission, et il prit sur lui de supprimer ce correctif.