Aller au contenu

Page:Michelet - OC, Histoire de France, t. 5.djvu/211

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
201
RÉFORME ET PACIFICATION DE LA FRANCE

d’Anjou. Dès le commencement de ce règne, nous la voyons puissante ; c’est elle qui fait accueillir la Pucelle ; c’est avec elle, dans une occasion, que le duc d’Alençon s’entend sur les préparatifs de la campagne. Cette influence, balancée par celle des favoris, semble avoir été sans rivale, du moment que la vieille reine eut donné à son gendre une maîtresse, qu’il aima vingt années (1431-1450).

Tout le monde connaît le petit conte : Agnès dit un jour au roi que, toute jeune, elle a su d’un astrologue qu’elle serait aimée d’un des plus vaillants rois du monde : elle avait cru que c’était Charles, mais elle voit bien que c’est plutôt le roi d’Angleterre, qui lui prend tant de belles villes à sa barbe ; donc elle ira le trouver… Ces paroles piquent si fort le roi qu’il se met à pleurer, « et quittant sa chasse et ses jardins, il prend le frein aux dents », si bien qu’il chasse les Anglais du royaume[1].

Les jolis vers[2] de François Ier prouvent que cette tradition remonte plus haut que Brantôme. Quoi qu’il en soit, nous trouvons un éloge équivalent d’Agnès dans une bouche ennemie, celle du chroniqueur bourguignon, à peu près contemporain : « Certes, Agnez estoit une des plus belles femmes que je vis oncques, et fit en sa qualité beaucoup de bien au royaulme. » Et encore : « Elle prenoit plaisir à avancer devers le roy

  1. Brantôme.
  2. Gentille Agnès, plus de los en mérite
    (La cause estant de France recouvrer),
    Que ce que peut, dedans un cloistre, ouvrer
    Close nonnain ou bien dévot ermite.