L’opération était délicate ; elle fut habilement conduite[1]; le roi chargea les seigneurs qui lui étaient le plus dévoués de sonder les principaux capitaines et de leur offrir le commandement des quinze compagnies de gendarmerie régulière. Ces compagnies, chacune de cent lances (600 hommes), furent réparties entre les villes ; mais on eut soin de les diviser de sorte que dans chaque ville (même dans les plus grandes, Troyes, Châlons, Reims), il n’y avait que vingt ou trente lances. La ville payait sa petite escouade et la surveillait ; partout les bourgeois étaient les plus forts et pouvaient mettre les soldats à la raison. Les gens de guerre qui ne furent pas admis dans les compagnies, se trouvèrent tout à coup isolés, sans force ; ils se dispersèrent. « Les Marches et pays du royaume devinrent plus sûrs et mieux en paix, dès les deux mois qui suivirent, qu’ils n’avaient été trente ans auparavant[2]. »
Il y avait trop de gens qui gagnaient au désordre pour que cette réforme se fît sans obstacle. Elle en rencontra, de timides, il est vrai, dans le conseil même du roi. Les objections ne manquèrent pas : les gens de guerre allaient se soulever, le roi n’était pas assez riche pour de telles dépenses, etc.
La réforme financière, qui seule rendait l’autre possible, fut due, selon toute apparence, à Jacques Cœur.
- ↑ On n’a pu retrouver l’ordonnance relative à cette organisation militaire. — Quant à la taille, elle fut consentie par les États d’après l’ordonnance de 1439, sans qu’il fût spécifié qu’elle était permanente et perpétuelle. Cette grave innovation fut introduite par un sous-entendu. (Ordonnances, XIII.)
- ↑ Mathieu de Couci.