En cela, fort innocemment, il embarrassa ses ennemis. On sait que dans la subtile théorie de la loi anglaise le roi est parfait, qu’il ne peut ni mourir ni se tromper[1], ni oublier, ni être en clémence[2]. Il fallait donc obtenir de lui un mot contre lui, tout au moins un signe[3] par lequel il semblerait approuver la création d’un régent et la nomination d’un primat. Chez ce peuple formaliste, il n’y avait pas moyen de passer outre ; si le roi ne faisait entendre sa volonté, il n’y avait point de gouvernement civil ni ecclésiastique, point de magistrat ni d’évêque, point de paix du roi ni de Dieu ; il n’y avait plus d’État, l’Angleterre était morte légalement.
Une députation de douze pairs laïques et ecclésiastiques fut envoyée à Windsor. « Ils attendirent que le roi eût dîné, et ensuite l’évêque de Chester lui présenta respectueusement les premiers articles de la demande ; mais il ne répondit pas. Le prélat expliqua le reste ; mais pas un mot, pas un signe. Les lamentations, les
- ↑ Sir Edward Coke admet à grand’peine que le roi, immortel in genere, meure pourtant in individuo. App. 122.
- ↑ C’est comme une sorte de vertu magique, attribuée par les jurisconsultes au grand sceau royal : sa possession rendait légal tout gouvernement… Richard II, âgé de dix ans et demi, fut supposé en état de régner sans l’assistance d’une régence. (Hallam.)
- ↑ Il nous resle un compte terrible de tous les médicaments que le Parlement employa pour essayer de remettre le roi en état d’exprimer une volonté : « Clisteria, suppositoria, caputpurgia, gargarismata, balnea, emplastra, emoroidarum provocationes, etc. » (Rymer, 6 april 1454.)
toutefois fort excentrique dans sa jeunesse ; on se rappelle qu’il se présenta un jour à son père dans le costume d’un fol. Son portrait a quelque chose de bizarre et de béat, si j’en juge du moins par la belle gravure que M. Endell Tyler a donnée, d’après l’original de Kensington, en tête de ses Memoirs of Henry the fifth.