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Page:Michelet - OC, Histoire de France, t. 5.djvu/322

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HISTOIRE DE FRANCE

vue d’un signe[1]. Il montra des clefs dans un sac : « Voici, dit-il, les clefs d’Audenarde. » Audenarde, c’était l’Escaut supérieur, la route des vivres, l’approvisionnement du Midi ; en même temps, une ville sujette et ennemie de Gand, dévouée au comte.

Ce mot et ce signe suffirent pour enlever trente mille hommes. Chacun rentra chez soi pour prendre ses armes et ses vivres. Toutefois, un si grand mouvement ne put se faire si vite qu’un des Lalaing ne fût averti et ne se jetât dans Audenarde avec quelques gentilshommes ; il l’approvisionna à sa manière, engageant les paysans à y retirer leurs troupeaux, leurs vivres, gardant vivres et troupeaux, chassant les hommes. Il tint du 14 au 30 avril, et fut enfin secouru. Mais il en coûta un rude combat, où les chevaliers, s’élançant imprudemment entre les piques, y auraient péri, si les archers de Picardie n’avaient pris les Gantais en flanc. Les vaincus furent poursuivis jusqu’aux portes de Gand, où huit cents firent tête avec intrépidité ; les chevaliers admirèrent surtout un boucher qui portait la bannière du métier, fut blessé aux jambes et se battait encore à genoux. Ces bouchers de Gand se prétendaient de meilleure maison que toute la noblesse ; ils descendaient, disaient-ils, du bâtard d’un comte de Flandre ; ils s’appelaient : Enfants de prince, Prince-Kinderen.

Audenarde délivrée, le duc prit l’offensive et pénétra dans le pays de Waës, entre la Lys et l’Escaut,

  1. App. 153.