Aller au contenu

Page:Michelet - OC, Histoire de France, t. 5.djvu/351

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
341
JACQUES CŒUR. — LE DAUPHIN LOUIS

les Anglais, et qui se trouvait « petitement récompensé[1] », négociait sans trop de prudence à Londres et à Bruges ; il était en correspondance avec le dauphin. Tout cela, pour avoir été nié, n’en paraît pas moins indubitable[2]. Il avait des places en Normandie, une artillerie plus forte, selon lui, que celle du roi. Il s’offrait au duc d’York[3], qui pour le moment était trop occupé par la guerre civile, mais qui, s’il eût trouvé un moment de répit, s’il eût pu faire une belle course ici, par exemple occuper Granville, Alençon, Domfront et le Mans, qu’on se faisait fort de lui livrer, n’aurait plus eu besoin de guerre civile pour prendre là-bas la couronne ; l’Angleterre tout entière se serait levée pour la lui mettre sur la tête.

Le dauphin, même après l’affaire d’Alençon, croyait tenir en Dauphiné. Il était en correspondance intime

  1. Il semble même qu’il ait eu contre le roi une haine personnelle : « Icellui seigneur se complaignit à lui qui parle, en lui disant qu’il savoit bien que le Roy ne l’aimeroit jamais et qu’il estoit mal content de lui… Si je pouvois avoir une pouldre que je sçais bien et la mettre en la buée où les draps-linges du roy seroient mis, je le ferois dormir tout sec… » — Le duc avait envoyé à Bruges pour faire acheter chez un pharmacien de cette ville une herbe appelée martagon qui avait, disait-il, de nombreuses et merveilleuses propriétés, mais on n’était point parvenu à se procurer cette herbe. (Procès du duc d’Alençon, dépositions de son valet de chambre anglais et du premier témoin entendu.)
  2. Les dépositions des témoins au Procès sont pleines de détails naïfs qui ne peuvent guère être inventés.
  3. Robert Holgiles, natif de Londres et héraut d’armes du duc d’Excestre, dépose que le duc d’Alençon lui dit qu’il pouvoit dès ce moment mettre à la disposition du roi d’Angleterre « plus de neuf cents bombardes, canons et serpentines ; mais qu’il feroit ses efforts pour en avoir mille ; qu’il faisoit construire, entr’autres pièces d’artillerie, deux bombardes, les plus belles du roiaulme de France, dont l’une estoit de mestail, lesquelles il donneroit au duc d’York avec deux coursiers… que monseigneur le dauphin lui devoit envoier… » (Ibid.)