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Page:Michelet - OC, Histoire de France, t. 5.djvu/367

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CHARLES VII ET PHILIPPE-LE-BON

tages chevaleresques de la maison de Bourgogne, il n’en tenait grand compte ; il le montra dès qu’il fut roi. Au grand tournoi que le duc de Bourgogne donna à Paris, quand tous les grands seigneurs eurent couru, jouté, paradé, un inconnu parut en lice, un rude champion, payé tout exprès, qui les défia tous et les jeta par terre. Louis XI, caché dans un coin, jouissait du spectacle.

Revenons à Genappe. Dans cette retraite, il partageait son loisir forcé entre deux choses, désespérer son père et miner tout doucement la maison qui le recevait. Le pauvre Charles VII se sentait peu à peu entouré d’une force inquiète et malveillante ; il ne trouvait plus rien de sûr[1]. Cette fascination alla si loin, que son esprit s’affaiblissant, il finit par s’abandonner lui-même[2]. De crainte de mourir empoisonné, il se laissa mourir de faim[3].


    ne dédaigna pas de faire un traité avec ce fugitif (6 octobre 1460.) (Ms. Legrand.)

  1. Lire dans la Chronique Martinienne, si curieuse pour ce règne, une lettre que le dauphin écrivait pour qu’elle tombât entre les mains de son père : « J’ai eu des lectres du comte de Dampmartin que je faingtz de hayr. Dictes luy quil me serve toujours bien. »
  2. Quelques-uns disent que Charles VII songeait à placer la couronne sur la tête de son second fils. Le comte de Foix assura néanmoins qu’il n’avait pas même voulu lui donner la Guyenne en apanage. Il écrivit à Louis XI à son avènement : « L’année passée, estant le Roy vostre père à Mehun, les ambassadeurs du roy d’Espagne y estoient qui traictoient le mariage de mondit sieur vostre frère avec la sœur du roi d’Espagne ; il fut ouvert que les Espagnols requéroient que le Roy vostre père donnast et transportast la duché de Guyenne à monsieur vostre beau frère ; à quoy le Roy vostre dit père respondist qu’il ne luy sembloit pas bien raisonnable et que vous estiez absent, que estiez frère aisné et que estiez celuy à qui la chose touchoit le plus près après luy. » (Lenglet.)
  3. Charles VII fut singulièrement regretté des gens de sa maison : « Et