Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 2.djvu/110

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de rétablir l’ordre, et il semblait dire : « Vous ne savez que faire ? Eh bien, rendez-moi le pouvoir… »

L’effet de la scène fut prodigieux. L’Assemblée perdit la tête. Barère pleurait à chaudes larmes. Le roi sort, on court après lui, on se précipite. On va chez la reine. Elle reçoit la députation, avec le Dauphin. Toujours altière et gracieuse : « Voici mon fils, dit-elle, je lui apprendrai à chérir la liberté ; j’espère qu’il en sera l’appui. »

Elle ne fut pas ce jour-là la fille de Marie-Thérèse, mais la sœur de Léopold. Peu après, son frère lançait le manifeste hypocrite où il se déclara ami de la liberté, de la constitution des Belges, jusqu’à leur dire, lui, Empereur, qu’après tout ils avaient eu droit de s’armer contre l’Empereur.

Pour revenir, l’Assemblée délira complètement, ne sut plus ce qu’elle disait. Elle se lève tout entière, elle jure fidélité à la constitution qui n’est pas encore. Les tribunes se joignent à ces transports, dans un inconcevable enthousiasme. Tout le monde se met à jurer, à l’Hôtel de Ville, à la Grève, dans les rues. On chante un Te Deum. On illumine le soir. Pourquoi ne pas se réjouir ? La Révolution est faite, bien faite pour cette fois.

Du 5 février au 15, ce fut une suite de fêtes, à Paris et dans les provinces. Partout, sur les places publiques, on se pressait pour prêter le serment. Les écoliers, les enfants, y étaient conduits en bande. Tout était plein d’élan, de joie et d’enthousiasme.

Beaucoup d’amis de la liberté s’effrayaient de ce