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Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 3.djvu/287

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des puissances contre la Révolution. Il ne dit pas qu’à Venise on trouva un matin sur la place un homme étranglé, la nuit, par ordre du conseil des Dix, avec ce laconique écriteau : « Étranglé comme franc-maçon. » En Espagne, un pauvre émigré français, royaliste, mais voltairien, fut saisi par l’Inquisition, comme philosophe et déiste. Il était déjà revêtu de l’horrible san benito ; on voulait lui arracher une honteuse confession, contraire à sa conscience. L’infortuné aima mieux se donner la mort. Nous tenons ce fait lamentable d’un agent des inquisiteurs, qui vit, entendit, écrivit tout, du grenier même, Llorente (1791).

Brissot indiqua avec précision ce que voulaient nos ennemis, le genre de mort qu’ils réservaient à la Révolution : le fer ? Non, mais l’étouffement, « la médiation armée », pour parler le doux langage de la diplomatie. Et il ajouta, avec la même netteté, que l’on nous prierait, l’épée à la main, de nous faire Anglais, d’accepter la constitution anglaise, leurs pairs, leur chambre haute, leurs vieilleries aristocratiques. Qu’on lise aujourd’hui les Mémoires, alors inédits, soit des ministres étrangers, soit de nos constitutionnels ; on y apprend peu de choses qui n’aient été devinées par la pénétration de Brissot, dans ce remarquable discours.

« Eh bien ! dit-il, si les choses en viennent là, vous n’avez pas à balancer, il faut attaquer vous-mêmes. » Un applaudissement immense partit des tribunes et de la majorité de l’Assemblée.