Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 3.djvu/326

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doit couler ; mon ami Lescuyer est mort ; toute cette canaille mourra, et si quelqu’un s’y oppose, nous ferons faire feu sur lui… » Les autres baissaient la tête. Les seuls Raphel et Jourdan répétèrent, lâchement, comme un chœur : « Oui, il nous faut venger la mort de notre ami Lescuyer. »

L’homme qui se lançait ainsi à travers le jugement et commandait le massacre n’était autre que Mainvielle.

Ce qui n’influa pas peu sur Duprat, Mainvielle et ceux qui résolurent le massacre, ce fut l’exemple de Nîmes. L’idée malheureuse et fausse que le massacre de 1790 y avait fondé la Révolution était prêchée par des Nîmois dans une auberge, la nuit même du 16 octobre.

Effroyable génération de crimes, des Albigeois à la Saint-Barthélemy, et de là aux dragonnades, aux carnages des Cévennes. Nîmes se souvint des dragonnades. Avignon imita Nîmes. Paris imita Avignon.

Rien de plus imitateur, rien de moins original, on peut l’observer, que le crime.

Le lieu même où ce nouveau crime va s’exécuter dit ceci bien haut. On y voit le sang du 16 octobre, la trace des fureurs d’une nuit. Mais on y voit, lentement accumulée, aux chambres sépulcrales de l’Inquisition, au savant bûcher intérieur (si habilement construit, pour étouffer les morts secrètes), on y voit la grasse suie que laissa la chair brûlée. Le