Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 3.djvu/399

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Son fameux orateur, Gonchon, vint au club de l’Évêché offrir les flammes tricolores qui devaient décorer les piques. « Elles feront le tour du monde, dit Gonchon, nos piques et nos flammes ! Elles nous suffiront pour renverser tous les trônes. La cocarde tricolore est partie du bonnet de laine, elle ira jusqu’au turban. »

Le roi exprimant ses inquiétudes sur cet armement général, la municipalité n’osa point y mettre obstacle. Seulement elle ordonna à ceux qui s’armaient de piques d’en faire leur déclaration à leur section et de n’obéir qu’aux officiers de la garde nationale ou de la ligne. Ainsi ils ne formaient point corps, n’avaient point d’officiers à eux.

Le roi et les Jacobins, quelque peu amis qu’ils fussent des piques, furent bien forcés de s’y faire. La députation de Marseille, à sa tête Barbaroux, une belle jeune figure héroïque, vint déplorer, au sein du club, la lenteur avec laquelle on donnait des armes. « On craint d’armer le peuple, dit-il, parce qu’on veut encore l’opprimer. Malheur aux tyrans ! le jour n’est pas loin où la France entière va se soulever, hérissée de piques !… »

Elles demandaient à entrer, les piques, à ce moment même ; et l’on disait aux porteurs que le règlement défendait les armes. « Qu’elles entrent, dit Manuel, mais pour être déposées à côté du président. » (Oui ! Oui ! — Non ! Non !) — Mais alors Danton, par un mouvement noble et généreux :