Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 3.djvu/463

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politique de cette femme, nous pourrions dire : de ce vrai chef de parti. Elle mérita ce nom au moment dont nous racontons l’histoire. Elle marqua non plus par le style, la forme éloquente, mais par l’initiative. Elle eut celle des deux mesures qui devaient briser le trône.

Le conseil, neutralisé par Dumouriez, n’avançait à rien et ne faisait rien. L’Assemblée, sauf la mesure du licenciement de la garde, allait (qu’on me passe une expression d’alors), allait brissotant et ne faisait guère. Et la guerre avait commencé, et commencé par un honteux revers, commencé par dévoiler la pitoyable désorganisation de l’intérieur, la guerre restant administrée par les employés de l’Ancien-Régime, par les ennemis de la guerre. Pourquoi l’ennemi n’avançait-il pas, et qui l’empêchait ? On ne pouvait le deviner. L’ennemi ? Il était à Paris. Cette garde licenciée pour avoir changé d’habit, elle était là, tout armée, en mesure de frapper un coup ; tout au moins elle pouvait, l’étranger entrant en France, s’acheminant vers Paris, lui donner la main d’ici, l’attendre et l’aider, de sorte qu’au jour décisif nos défenseurs verraient l’ennemi devant et derrière, ne verraient rien qu’ennemis.

Une lettre, une feuille de papier brisa tout ceci. Servan, sous l’inspiration audacieuse de Madame Roland et sous sa dictée peut-être, oubliant qu’il était ministre et ne se souvenant que des dangers de la patrie, écrivit à l’Assemblée pour lui proposer d’établir ici, à l’occasion du 14 juillet, un camp de