Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 4.djvu/482

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la mode. Son roman, Faublas, sorti tout entier de la donnée du Chérubin de Figaro, n’était autre, disait-on, que l’histoire même de Louvet et la confidence de ses aventures qu’il avait faite au public. Quoi qu’il en fût, il s’était fort relevé par l’amour, par un amour pur, exalté ; il avait oublié Faublas près de sa Lodoïska ; il éprouvait le besoin d’être un homme, un citoyen ; il s’était remis aux mains pures et sévères de Madame Roland qui lui faisait écrire, pour son mari, le journal la Sentinelle.

Malgré sa métamorphose, l’ardent et brillant écrivain n’en était pas moins resté léger, romanesque. Rien de plus loin de la gravité. Fût-il vraiment devenu grave, personne ne l’aurait cru. Sa voix, son ton, y répugnaient. Son jeune visage était de ceux qui ne peuvent pas vieillir ; on le connaissait trop aussi ; la fatale célébrité de son roman le poursuivait à la tribune ; il lui semblait interdit de parler sérieusement. Un murmure s’élevait dès qu’il paraissait, un sourire, du côté de ses amis mêmes, et le petit mot : « C’est Faublas ! »

Voilà l’homme à qui les Roland eurent l’incroyable imprudence de permettre le rôle d’accusateur de Robespierre.

En face de ce pâle visage, qui respirait l’autorité, où le plus sérieux effort, la concentration la plus soutenue, étaient exprimés, placer le blondin Louvet, le romancier, le conteur, l’homme aux paroles légères, homme ? ou fille ? On n’en savait rien… Un tel choix, véritablement, devait être celui d’une