Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 5.djvu/183

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midi. Il la montait habituellement à cette heure, et il l’avait fait encore, deux heures avant l’échafaud.

On trouvera peu convenable que, près d’un nom si vénéré, j’amène Olympe de Gouges, une femme légère, très légère, comme on l’a dit durement. Cette femme s’est rapprochée de Malesherbes par l’analogie de son dévouement, et elle s’est trouvée aussi rapprochée de lui par la mort. Qu’il l’accueille donc près de lui dans cette histoire avec la bonté et l’indulgence paternelle qu’il aurait eue dans sa vie.

Elle n’était pas, comme lui, protégée par cette longue vie de services rendus au pays ; elle risquait davantage. Elle était fort compromise, cette infortunée ; elle avait déjà assez de se défendre elle-même. Plusieurs amis, Mercier entre autres, lui avaient conseillé, dès longtemps, de s’arrêter. Elle n’écouta personne, parla toujours et très haut, flottant d’un parti à l’autre, selon sa sensibilité, au flot de son cœur. Révolutionnaire de nature et de tendance, lorsqu’elle vit pourtant, au 6 octobre, le roi et la reine amenés ici captifs, elle se sentit royaliste. La mauvaise foi de la cour et sa trahison évidente la refirent républicaine, et elle conta naïvement sa conversion au public dans un noble pamphlet : la Fierté de l’Innocence. Elle fondait alors des sociétés populaires de femmes, essayant de tenir un milieu difficile entre les Jacobins et les Feuillants. Ses liaisons avec la Gironde, son Pronostic sur Robespierre ne la mettaient que trop en péril, lorsque la scène