Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 5.djvu/56

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La presse n’était point cela ; elle est insuffisante à une telle destination. Son action est immense ; mais, parmi tant de choses contradictoires qu’elle dit, cette action est vague, flottante. De paroles en paroles, souvent elle manque le moment, elle n’arrive point à l’acte. Plusieurs, dès qu’ils ont lu, relu, amusé leur passion du bruit des journaux, sont satisfaits et ne font plus rien.

L’Assemblée n’était pas non plus la force dont nous parlons. La grande masse de la Convention, cinq cents députés au moins, timides, incertains, défiants, souvent pensaient d’un côté et votaient de l’autre, nageaient, flottaient, sans avancer.

La situation demandait une force qui, sans prendre précisément l’Assemblée à la remorque, marchât devant elle, écartant sévèrement ce qui lui ferait obstacle, ce qui la pouvait tromper, lui triant, épurant d’avance et les hommes et les idées, la maintenant sur la ligne étroite, inflexible, des principes.

Grand rôle, qui supposait une autorité extraordinaire. Il impliquait deux choses fort diverses, qui exigent des vertus rarement conciliées : la censure morale et politique, force négative, l’initiative révolutionnaire, force positive.

La censure exige surtout du censeur que, pour censurer, critiquer, écarter le mélange impur, il ait un principe très pur, une idée du droit très simple et très forte. Les Jacobins flottèrent toujours, on le verra, entre deux idées. Ils se renouvelèrent