Page:Michelet - OC, Histoire du dix-neuvième siècle, t. 1.djvu/26

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ment. Le naturaliste et l’historien (ce qui est même chose) est celui qui supprime les miracles en les expliquant, et montre que les plus étonnants ne sont que des cas naturels.

Pour Bonaparte, un sérieux examen prouvera que (bien loin que son succès fût un miracle), le miracle eût été qu’avec de telles circonstances il ne réussît pas.

Le gouvernement qui venait après le grand effort de 93 était perdu par la seule lassitude d’un tel effort (Voy. Hamel). Perdu financièrement par les milliards de faux assignats que fabriquèrent les Anglais, perdu militairement par la nécessité où il fut de réformer en un an trois cent mille soldats, dix-sept mille officiers. Il était facile à prévoir que ces gens licenciés regarderaient vers un chef et le suivraient. Ils ne voulurent pas un des leurs, mais plutôt un étranger, que le maladroit Barras et le crédule Carnot élevèrent à l’envi, et qui, avec l’armée merveilleuse de la Révolution, eut de très rapides succès.

Une étrange coïncidence, mais facile à concevoir, c’est qu’indépendamment de l’armée, il vit la nation venir à lui. Pourquoi ?

La France ayant eu la magnanime imprudence de laisser rentrer les émigrés, un débat interminable s’élevait entre l’émigré de retour et l’acquéreur de biens nationaux, entre l’ancien et le nouveau propriétaire. Comment juger un tel procès ? On crut que tout Français y était trop intéressé. On se fia à cet Italien qui donnait des espérances à tout le monde.