Page:Michelet - OC, Histoire du dix-neuvième siècle, t. 1.djvu/28

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Les vainqueurs, les vaincus en ont également souffert. Et je ferai effort pour leur faire à tous réparation. On verra quelle conspiration le bonapartisme fit constamment contre Hoche, Massena et tant d’autres héros. Je rendrai aussi ce qu’on doit aux Hongrois, Slaves et tant de nations brutalement perdues dans le nom d’Autrichiens et qui, tant de fois, dans cette lutte, ont relevé l’Autriche avec une mémorable obstination.

L’Italie a bien le droit de réclamer aussi contre un faux Italien qui, bien loin de l’aider au grand moment de son réveil (95), l’a constamment injuriée par de funèbres mots qui la replongeaient dans la tombe.


Je me félicite de publier si tard les vues qu’à diverses époques de ma vie j’eus sur Bonaparte, ce sujet où tant de gens ont regardé sans voir. C’est, certainement, le plus difficile de l’histoire, le plus obscur en plein soleil par la quantité des mirages et des fausses lueurs qui ont égaré les esprits.

Il n’est aucun exemple d’une vie si préparée et si voulue. Né d’une prophétie, dès l’enfance élevé et s’élevant lui-même pour les réaliser, en tout le reste variable, il fascina par des moyens divers[1] des

  1. Cette fascination très grossière n’a jamais été remarquée. La France, après la Terreur, avait perdu le rire, sa grande arme contre les tyrans. Bonaparte y prêtait beaucoup. On ne s’en avisa que tard. Son bavardage étourdissant, d’un hâbleur si souvent vulgaire, en faisait un personnage de