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Page:Michelet - OC, Légendes démocratiques du Nord, La Sorcière.djvu/420

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séduit par un argument, non de mot, mais tout réel, charmant et irrésistible. Il lui met en main le fruit de la science et de la nature.

Il ne faut pas tant de disputes ; il n’a pas besoin de plaider ; il se montre. C’est l’Orient, c’est le paradis retrouve. De l’Asie qu’on a cru détruire, une incomparable aurore surgit, dont le rayonnement porte au loin jusqu’à percer la profonde brume de l’ouest. C’est un monde de nature et d’art que l’ignorance avait maudit, mais qui, maintenant, avance pour conquérir ses conquérants, dans une douce guerre d’amour et de séduction maternelle. Tous sont vaincus, tous en raffolent ; on ne veut rien que de l’Asie. Elle vient à nous les mains pleines. Les tissus, châles, tapis de molle douceur, d’harmonie mystérieuse, l’acier galant, étincelant, des armes damasquinées, nous démontrent notre barbarie. Mais, c’est peu, ces contrées maudites des mécréants où Satan règne, ont pour bénédiction visible les hauts produits de la nature, élixir des forces de Dieu, le premier des végétaux, le premier des animaux, le café, le cheval arabe. Que dis-je ? un monde de trésors, la soie, le sucre, la foule des herbes toutes-puissantes qui nous relèvent le cœur, consolent, adoucissent nos maux.

Vers 1300, tout cela éclate. L’Espagne même reconquise par les barbares fils des Goths, mais qui a tout son cerveau dans les Maures et dans les juifs, témoigne pour ces mécréants. Partout où les musulmans, ces fils de Satan, travaillent, tout prospère, les sources jaillissent et la terre se couvre de fleurs. Sous un travail méritant, innocent, elle se