Page:Michelet - OC, Légendes démocratiques du Nord, La Sorcière.djvu/578

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le soutenait pas. Il s’obstina dans une brochure qui restera. Il accepte ce grand duel de la science contre le clergé, déclare (comme Wyer au seizième siècle) « que le vrai juge en ces choses n’est pas le prêtre, mais l’homme de science ». À grand-peine, il trouva quelqu’un qui osât imprimer, mais personne qui voulût vendre. Alors, ce jeune homme héroïque se fit en plein soleil distributeur du petit livre. Il se posta au lieu le plus passager de Paris, au pont Neuf, aux pieds d’Henri IV, donna son factum aux passants. On trouvait à la fin le procès-verbal de la honteuse fraude, le magistrat prenant dans la main des diables femelles la pièce sans réplique qui constatait leur infamie.


Revenons à la misérable Madeleine. Le pénitencier d’Évreux, son ennemi, qui l’avait fait piquer (en marquant la place aux aiguilles ! p. 67), l’emportait, comme sa proie, au fond de l’in-pace épiscopal de cette ville. Sous une galerie souterraine plongeait une cave, sous la cave une basse-fosse où la créature humaine fut mise dans les ténèbres humides. Ses terribles compagnes, comptant qu’elle allait crever là, n’avaient pas même eu la charité de lui donner un peu de linge pour panser son ulcère (p. 45). Elle en souffrait et de douleur et de malpropreté, couchée dans son ordure. La nuit perpétuelle était troublée d’un va-et-vient inquiétant de rats voraces, redoutés aux prisons, sujets à manger des nez, des oreilles.

Mais l’horreur de tout cela n’égalait pas encore