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Page:Michelet - OC, Légendes démocratiques du Nord, La Sorcière.djvu/641

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des siennes. Il eut à la fois et ces minutes écrites par le Jacobin et les copies que l’autre frère faisait et lui envoyait. Dès lors il ne craignait rien. Nul contrôle possible. Il put en ôter, en remettre, détruire, biffer, falsifier. Son travail de faussaire était parfaitement libre, et il a bien travaillé. De quatre-vingts lettres il en reste seize, et encore elles semblent des pièces laborieuses, fabriquées après coup.

Girard, ayant tout en main, pouvait rire de ses ennemis. À eux désormais de craindre. L’évêque, homme du grand monde, savait trop bien son Versailles et le crédit des Jésuites pour ne pas les ménager. Il crut même politique de lui faire une petite réparation pour son malicieux reproche relatif au Livre de vie, et lui dit gracieusement qu’il voulait tenir un enfant de sa famille sur les fonts de baptême.

Les évêques de Toulon avaient toujours été de grands seigneurs. Leur liste offre tous les premiers noms de Provence, Baux, Glandèves, Nicolaï, Forbin, Forbin d’Oppède, et de fameux noms d’Italie, Fiesque, Trivulce, La Rovère. De 1712 à 1737, sous la Régence et Fleury, l’évêque était un La Tour du Pin. Il était fort riche, ayant aussi en Languedoc les abbayes d’Aniane et de Saint-Guilhem du Désert. Il s’était bien conduit, dit-on, dans la peste de 1721. Du reste, il ne résidait guère, menait une vie toute mondaine, ne disait jamais la messe, passait pour plus que galant.

Il vint à Toulon en juillet, et, quoique Girard l’eût détourné d’aller à Ollioules et de visiter la Cadière, il en eut pourtant la curiosité. Il la vit dans un de