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LES VENDÉENNES EN 90 ET 91

ceux qui refusaient le serment. L’Assemblée autorisa les directoires à éloigner les prêtres réfractaires de toute commune où il surviendrait des troubles religieux.

Cette mesure fut motivée non seulement par les violences dont les prêtres constitutionnels étaient partout l’objet, mais aussi par une nécessité politique et financière. Le mot d’ordre que tous ces prêtres avaient reçu de leurs supérieurs ecclésiastiques, et qu’ils suivaient fidèlement, c’était, nous l’avons dit, d’affamer la Révolution. Ils rendaient impossible la levée de l’impôt. Elle devenait une chose si dangereuse, en Bretagne, que personne ne voulait s’en charger. Les huissiers, les officiers municipaux, étaient en danger de mort. L’Assemblée fut obligée de lancer ce décret du 27 novembre 91, qui envoyait au chef-lieu les prêtres réfractaires, les éloignait de leur commune, de leur centre d’activité, du foyer de fanatisme et de rébellion où ils soufflaient le feu. Elle les transportait dans la grande ville, sous l’œil, sous l’inquiète surveillance des sociétés patriotiques.

Il est impossible de dire tout ce que ce décret suscita de clameurs. Les femmes percèrent l’air de leurs cris. La loi avait cru au célibat du prêtre ; elle l’avait traité comme un individu isolé, qui peut se déplacer plus aisément qu’un chef de famille. Le prêtre, l’homme de l’esprit, tient-il donc aux lieux, aux personnes ? n’est-il pas essentiellement mobile, comme l’esprit dont il est le ministre ? À toutes ces questions, voilà qu’ils répondaient négativement, ils s’accusaient eux-mêmes. Au moment où la loi l’enlevait de terre, ce prêtre, on s’apercevait des racines