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Page:Michelet - OC, Les Femmes de la Révolution, Les Soldats de la Révolution.djvu/340

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LES SOLDATS DE LA RÉVOLUTION

pour notre nation, blessa le grand cœur de Kléber. Il prit le parti des jeunes étrangers, le parti même de la France, dont on compromettait l’honneur. Il déclara que la querelle était sienne, et obligea le faux brave qui provoquait des enfants d’avoir affaire à un homme. Les parents des jeunes étrangers, qui apprirent la chose, furent touchés de cette générosité, et firent entrer Kléber dans une école militaire de l’Allemagne ; faveur rare et singulière qu’il n’eut pas obtenue en France, où Louis XVI venait d’interdire tout rang d’officier à ceux qui ne pouvaient prouver quatre degrés de noblesse.

Hoche eut une affaire analogue. Soldat aux Gardes-françaises, il voyait ses camarades vexés par un sous-officier délateur et spadassin. Il prit pour lui la querelle commune, et, bravant ce double péril, il punit le misérable.

La protection des faibles, l’amour des petits, c’était leur instinct et leur lot à ces chevaliers du droit nouveau. Un jour, Kléber et Marceau, dans cette affreuse Vendée, traversant un pays brûlé, désert, dont la population était en fuite, aperçoivent dans un buisson un berceau renversé. Ils approchent, ils y voient deux toutes petites filles. Filles et berceau, ils emportèrent le tout, malgré un long trajet, jusqu’à la première ville. Les enfants arrivèrent dans les bras de ces étranges nourrices. On retrouva par bonheur les parents, riches meuniers de la contrée ; dans une fuite précipitée, nocturne, le berceau était apparemment tombé d’une voiture ; on pleurait les enfants qu’on croyait perdus.

L’aspect terrible de cette Vendée avait frappé au